Discret depuis son départ de la présidence de la conférence des évêques de France, en juillet, Mgr André Vingt-Trois, archevêque de Paris aborde l'année 2014 par un entretien à Radio Notre Dame, la chaîne de son diocèse, diffusé vendredi 3 janvier, dans lequel il ne mâche pas ses mots.
"Des voix muettes" face aux Femen
Sa première pique vise "les grands défenseurs de la laïcité" qui ne se sont pas manifestés suite à la provocation des Femen, dans une église parisienne le 20 décembre. L'une des membres de ce groupuscule avait simulé un avortement à La Madeleine. "C’était le moment de montrer que la laïcité est la protectrice des croyances et des religions ! Il y a des voix importantes qui sont restées muettes !", déplore le cardinal. Mgr Vingt-Trois, qui ironise sur le fait qu'à "quelques encablures du ministère de l'intérieur on n'a pas su qu'il se passait quelque chose à La Madeleine", relève toutefois que le maire de Paris et les deux candidates à la succession de Bertrand Delanoë ont condamné cet acte. Il précise aussi avoir porté plainte.
Antisémitisme: "rien n'est anodin"
Sa deuxième charge concerne l'humoriste provocateur Dieudonné, plusieurs fois condamné pour des propos antisémites. "L’intervention de Manuel Valls [le ministre de l'intérieur a évoqué une interdiction de ses spectacles] a eu un effet salutaire dans la mesure où elle fait réfléchir, et il faut faire réfléchir. Rien n’est anodin en matière d’antisémitisme, comme pour la xénophobie ou la discrimination religieuse. Il est scandaleux que nous soyons insensibles à la dépréciation progressive des seuils à ne pas franchir. Une culture du respect de l’autre, des autres religions, doit se réimplanter d’une manière forte. Que l’on apprenne aux enfants qu’il y a des choses qui ne se font pas !", plaide le cardinal.
Contre une "vision libérale de la morale"
Qualifiant l'antisémitisme de "poison", il rappelle qu'il ne s'agit pas seulement d'une "agression contre les juifs, mais d'une agression qui concerne l’humanité entière". "On ne doit pas laisser se développer et se banaliser les caricatures, la dérision, la provocation. Ces provocations sont le symptôme d’une société dans laquelle on ne tient plus les seuils de protection, protection de l’identité propre de chacun", affirme-t-il. Dans ce contexte, il met en cause la "vision libérale de la morale" et regrette qu'en l'absence de "règles morales", "tout devienne possible".
Le cardinal met aussi en garde contre la culture véhiculée par les réseaux sociaux, "vecteurs de rumeurs et de l'information instantanée". "Les provocations et la dérision sont devenues comme une seconde culture", déplore-t-il aussi, souhaitant pour sa part pour 2014 une société "apaisée".
Les organisations juives, le Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif) et l'Union des étudiants juifs de France (UEJF) ainsi que la grande mosquée de Paris ont, ces dernières semaines, réagi aux propos de Dieudonné et condamné le geste de "la quenelle", popularisé par l'humoriste.
Stéphanie Le Bars
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