“Je suis Femen”: sur les pas d’Oksana Chatchko

« Si je suis prête à donner ma vie pour mes idées ? Mais je l’ai déjà donnée ! Je l’ai donnée, mue par une conviction : le véritable art, c’est la révolution », répliquait l’an passé Oksana Chatchko, la confondatrice des Femen aux questions que nous lui posions : pourquoi risquer votre vie, à quoi bon risquer sa peau ? Elle faisait une nouvelle fois preuve de sa détermination animée par une conviction sans ombres, luttant « au nom de la liberté personnelle mais aussi au nom de l’humanité, pour défendre le droit des femmes et leur place dans la société. Ce ne sont pas de grands mots : je dois pouvoir montrer l’exemple si je crois en ce que je fais. »

L’exemple, elle le donne dans le documentaire que le réalisateur suisse Alain Margot lui consacre, à elle et au mouvement qu’elle a créé. Je suis Femen, tourné entre mars 2011 et septembre 2013, suit la trajectoire de cette artiste militante hors pair et, dans son orbite, de ses comparses ukrainienne, amies d’enfance et confondatrices du mouvement : Anna Hutsol et Sasha Shevchenko.

 

Née en 1987, Oksana débute son activité militante dans la petite ville de province où elle voit le jour, Khmelnitski. Hésitant un temps entre la retraite religieuse et l’activisme, elle penche finalement vers l’action sans rejeter pour autant la contemplation. En témoigne aujourd’hui encore sa passion pour les icônes, qu’elle continue de peindre patiemment, avec talent... lorsqu’elle ne peint pas des banderoles contre Poutine, contre la corruption ou contre l’Église, quand elle ne crée pas des costumes et des masques pour une intervention surprise à Kyiv ou encore lorsqu’elle n’est pas en prison. Car Oksana y a passé de semaines, suite à des centaines d’arrestations en Ukraine comme en Russie ou en Biélorussie, tant et si bien que les services secrets ukrainiens l’ont finalement arrêtée et battue, simulant une exécution, avant de la relâcher dans les bois. Dernière menace dans son pays, avant de décider son exil en France, où elle vit désormais.

Alain Margot s’est pris d’une évidente sympathie pour Oksana, qui n’en manque pas, et dont il dresse un portrait en nuance, de jeune femme militante et sensible, déterminée et réfléchie. Le cinéaste ne s’aventure pas sur le terrain polémique, son œil distant bien qu’amical, ne creuse pas les aspérités du mouvement ; il ne dit presque rien de Victor Vyatski dont le rôle, soupçonné parfois d’avoir une emprise autoritaire sur les Femen, a pourtant fait débat. Le cinéaste réserve son jugement tandis qu’un autre documentaire récent se montre plus sévère et critique sur le rôle de Victor Sviatski au sein des Femen : L’Ukraine n’est pas un bordel de l’australienne Kitty Green.


 

Ces limites et ces contradictions inhérents à toute action politique résolue, des spectateurs, bien qu’admiratifs de la conviction et du courage de ces militantes, les ont soulevées à l’issue d’une projection à Paris, à laquelle Sasha Shevchenko et Oksana Shachko ont assisté.

En vrac: comment faire pour ne pas réduire la portée du mouvement à des effusions spectaculaires ? Monter ses seins est au fond une autre façon de disjoindre la femme de son image érotique, d’associer à cette partie du corps un autre message que le message purement libidinal véhiculé par les clichés féminins ; en outre, que les Femen soient de plantureuses jeunes femmes brise un autre poncif, voulant que l’activiste ne puisse pas être désirable ou, inversement, qu’une jolie femme ne puisse pas se rebiffer.

Quel avenir imaginer pour les Femen, hors d’Ukraine ? Les Femen ont essaimé en Europe et dans le monde. Femen Canada est dynamique. En Allemagne, aussi le mouvement prend de l’ampleur. En France, le mouvement Femen international et Femen France sont irréconciliables. 

Comment comprendre la dissension entre Femen international, auquel Oksana Chatchko et Sasha Shevchenko appartiennent, et Femen France, dont les militantes se sont illustrées le 1er mai dernier en interrompant le discours de Marine Le Pen sur la place de l’Opéra ? Pour Oksana et Sasha, il est impossible de travailler avec des militantes plus préoccupées par leur égo et leur image médiatique que par les valeurs féministes. La discorde est établie. Pour autant, elles soutiennent le mouvement Femen qui défend en France de justes causes… pour de mauvaises raisons.

Les bonnes raisons d’aller voir le documentaire d’Alain Margot, elles, ne manquent pas, à commencer par sa qualité de réalisation. À retrouver en DVD depuis le 23 avril 2015.

Information

 

Via: philomag.com


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