Les aïeules africaines des Femen

Les méthodes des Femen sont employées depuis longtemps en Afrique, rappellent des intellectuelles féministes.



Depuis 2008 et les premières actions seins nus du groupe féministe ukrainien, les Femen n’ont cessé de créer la polémique. Elles indignent les églises, exaspèrent les conservateurs mais elles divisent aussi les féministes.

Pour certaines, comme l’Allemande Alice Schwarzer, la nudité des Femen, risque de conforter les représentations masculines traditionnelles du corps féminin objet. Quant à Asma Guenifi, la présidente de «Ni putes ni soumises», elle va jusqu’à dénoncer «la misandrie» des Femen.

Mais la dernière critique en date du mouvement a pris de l’ampleur depuis le débarquement des Femen en Tunisie pour soutenir la militante Amina Tyler, de son vrai nom Amina Sboui. La jeune femme encourt deux ans de prison pour avoir posté des photos d’elle la poitrine dénudée sur la page Facebook de Femen-Tunisie et pour port illégal d’un spray lacrymogène.

L’arrivée à Tunis des trois Femen européennes –deux Françaises et une Allemande- condamnées à quatre mois de prison ferme pour avoir manifesté seins nus leur soutien à leur camarade emprisonnée leur vaut désormais d’être taxées de «néocolonialisme». C’est ce qu’écrit notamment Sara Salem, doctorante à l'Institut des sciences sociales des Pays-Bas, dans une tribune parue sur le monde :

«La volonté des Femen d'universaliser leur type de féminisme confère un caractère néocolonial à leur militantisme et à leur organisation (…) La question de l'universalisation du féminisme n'est pas nouvelle. De nombreuses féministes occidentales prirent une part active au processus colonial en voulant "civiliser" et "moderniser" les femmes des pays arabes et africains», écrit-elle.

En 1929, au Nigeria, les femmes Igbo se mettent nues pour obtenir un véritable rôle politique

Certaines intellectuelles vont même plus loin: non seulement les Femen tentent d’imposer leur vision occidentale du féminisme, mais, de surcroît elles ont «piqué» leurs méthodes aux femmes africaines. «Avons-nous oublié les grandes manifestations de femmes nues au Nigeria, Liberia, Kenya et en Ouganda qui se sont succédé pendant plus d’un siècle?» déplore Maryam Kazeem sur Okayafrica . Dès 1929, rappelle-t-elle, au Nigeria, les femmes Igbo ont utilisé ce mode de protestation pour obtenir un véritable rôle politique dans les instances du pouvoir coutumier et auprès de l’administration coloniale britannique.

Il y a à peine six mois, en décembre 2012, des femmes âgées, la poitrine nue, ont défilé en tête d’une manifestation en Afrique du Sud pour dénoncer les violences quotidiennes infligées par un gang de voyous à la communauté rurale de Sonde Apon. Tout au long du siècle, les exemples de manifestations d’Africaines utilisant leur nudité pour exprimer leur résistance à tous les types d’oppression sont nombreux. Et parfois d’une efficacité redoutable: en 2002, au Nigeria, des femmes en lutte contre la pollution occasionnée par l’industrie pétrolière sont parvenues à paralyser pendant huit jours la plus grande installation pétrolière de la région en menaçant simplement de se dévêtir. Les ouvriers de la raffinerie ont aussitôt abandonné leur poste de crainte d’être victime de «la malédiction de la nudité».

Car, explique Sokari Ekine, Coordinatrice Internationale des Femmes du Delta du Niger, «le fait d'ôter ses vêtements, en particulier pour des femmes mariées et plus âgées, est une façon de déshonorer les hommes. Certains pensent que s'ils voient les corps nus, ils vont être affligés d'un grand mal ou sombrer dans la folie».

«Venez en Tunisie ! Nous couperons vos seins et nous les donnerons à manger à nos chiens !» menaçait un islamiste qui avait piraté fin mars la page Facebook des Femen. La malédiction de la nudité est bien réelle: elle rend fou. 

Ci-dessus, un extrait de The Naked Option: A Last Resort, «un documentaire de Candace Schermerhorn qui met en scène la voix des femmes, des hommes et des représentants de sociétés impliqués dans les protestations de 2002 dans les installations pétrolières de Escravos au Nigeria».

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Via: parismatch.com


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