Les Femen à l’assaut du système dominant ?

Qui peut mesurer, et sur quels critères, l’efficacité réelle de telles actions ? N’est-ce pas de la mauvaise foi d’occulter les risques encourus à l’occasion d’actions menées en Tunisie, Russie, Turquie, Biélorussie, ou même en France lors de la manifestation contre le mariage pour tous ? A moins que le reproche subliminal ne soit de ne pas s’être offertes en martyres au milieu des talibans en Afghanistan ?
 

Les raisons principales de ces critiques ne résident pas en cela. Les Femen dérangent certaines belles âmes pour s’échiner à saper les bases du système dominant. Les querelles de méthode ne sont que prétextes ; ce qui est en cause, c’est l’idéologie ainsi construite et véhiculée. Les questions de forme sont en réalité des débats de fond remontant à la surface.
 

Les Femen se fixent pour objectif la victoire totale sur le patriarcat. Elles s’en donnent les moyens en allant de manière systémique à la racine du problème. Elles en ciblent clairement les trois manifestations les plus tangibles et les plus destructrices : l’industrie du sexe, la dictature, le cléricalisme. En d’autres termes, l’alliance de la bourse, du glaive et du goupillon qui n’ont eu de cesse de favoriser forfaits et humiliations.
 

Les Femen ont bâti leurs références de citoyennes militantes dans le rejet du capitalisme sauvage post-soviétique et par un ressourcement à la grille d’analyse marxiste. Ces bases leur ont permis de s’inscrire dans la lignée des combats universalistes portés par l’intérêt général. C’est le cas de la critique résolue des oligarchies conquérantes : le combat féministe a été irrigué par les enjeux sociaux et républicains. 
 

Considérant la religion comme opium et instrument d’asservissement, revendiquant leur athéisme, elles stipulent la séparation des Eglises et de l’Etat comme un absolu non négociable. Elles ont également élargi leur champ d’action à l’anticapitalisme, comme en témoignent leur action à Davos, dans une dialectique marxiste entre infrastructure et superstructure. Ces boussoles idéologiques constituent les garanties les plus sûres de la promotion d’une philosophie de l’émancipation à laquelle elles se  rattachent.
 

Il existe cependant des écueils dont les Femen devront se défier. Les tentatives de récupération sont et seront nombreuses. Elles peuvent conduire à l’affadissement de leur discours et les pousser imperceptiblement à devenir malgré elles davantage « raisonnables ». Leur projet est bien d’essence révolutionnaire dans la mesure où la cible à abattre est le système dominant dans la diversité de ses facettes. Il leur faudra donc se garder des formes insidieuses de connivence. 

Et symétriquement veiller à ne pas se transformer, par l’enfermement dans des postures « rétrécissantes », en caricatures d’elles-mêmes. Un type de mode de revendication et d’action correspond à une période déterminée de l’histoire. Il ne représente ni un dogme indépassable ni la finalité ultime.  

 

Le plus beau compliment que l’on puisse faire aux Femen serait de dire simplement qu’elles font œuvre utile. Elles articulent en effet l’idéalisme et l’esthétisme d’une révolution faite au nom du progrès humain. Elles méritent bien de Marianne. 
 

(*)  secrétaire général de l’AGAUREPS-Prométhée (Association pour la gauche républicaine et sociale – Prométhée).

Via: marianne.net


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