PROSTITUTION - Il y a l'art et la manière. Certes, le système médiatique appelle le buzz et parfois l'excès en vue d'ouvrir et de provoquer le débat, mais une erreur sur la forme peut entraîner une catastrophe sur le fond. Cette réalité, les 343 salauds vont peut être l'apprendre à leur dépends. S'ils mettent en avant "l'humour" dans lequel s'inscrit leur démarche, elle n'en a pas moins suscité de nombreuses critiques qui ont pris le manifeste très au sérieux.
Et si la twittosphère s'énerve, c'est d'abord à cause des références. "Touche pas à ma pute" inspiré par "touche pas à mon pote", "le manifeste des 343 salauds" évoquant celui des "343 salopes", entre lutte contre le racisme et revendication historique des femmes à disposer de leur corps, d'aucuns trouvent la pilule difficile à avaler. D'autant plus difficile qu'il est question de prostitution et plus précisément d'une réaction au projet de loi du gouvernement qui entend pénaliser les clients.
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Alors qu'ils font l'objet de nombreuses critiques, y compris parmi les opposants au projet de loi comme la sénatrice Esther Benbassa, l'initiative pourrait bien se révéler contre-productive. "Machisme", "patriarcat", "connards", "réacs", les invectives contre les "salauds" vont bon train, quitte à faire oublier le véritable débat. Jeudi 31 octobre, Nicolas Bedos, l'un des signataires, prenait d'ailleurs ses distances avec une pétition qu'il estimait "très mal foutue, donc mal comprise".
Pas de panique, Nicolas. Ce genre de choses arrive, et les 343 salauds ne sont pas les premiers à semer la provocation et récolter la critique. Humour et provocation ne font pas souvent bon ménage, maladresse et précipitation non plus. En témoigne ce manuel des pires polémiques (le "bad buzz" diront les jeunes) dans lesquelles les initiatives des auteurs ont desservi leur cause, qu'elle soit bonne ou mauvaise.
Moyen n°1 - Le bouchon un peu trop loin tu pousseras
Nous sommes le 12 février 2013, à Paris. Chose rare, la veille, un pape a fait preuve d'innovation. Depuis la bonne ville de Rome, Benoît XVI a annoncé sa démission. Le lendemain, v'la-ti-pas qu'un groupe de Femen se déshabille dans la cathédrale de Notre-Dame où elles exhibent mamelons et slogans anticléricaux. "Pope no more!", à bas le pape, s'exclament-elles. Horreur et stupéfaction dans la maison de Dieu!
Mais malgré toute la sympathie que les Femen ont pu inspirer aux féministes, l'affaire tourne court. En plein débat sur le mariage gay, les catholiques font les vierges effarouchées, mais ils ne sont pas les seuls. À gauche, Manuel Valls, Bertrand Delanoë ou encore la ministre du Droit des femmes Najat Vallaud-Belkacem dénoncent une "provocation inutile". Les Femen ont-elle retenu la leçon? On peut légitimement en douter.
Quelques mois plus tard, le 22 mai, une Femen déboule à nouveau seins nus dans la cathédrale. Il faut dire que la veille Notre-Dame avait été sanctuarisée par le suicide de la figure d'extrême droite Dominique Venner. L'homme s'était tiré une balle dans la tête, l'occasion était trop belle pour la militante de ne pas hurler son refus du fascisme.
Moyen n°2 - Le mal par le mal tu soigneras
Soigner le mal par le mal peut être périlleux. Le réalisateur Xavier Dolan l'a appris à ses dépends. Auteur du clip de la chanson d'Indochine College Boy, le jeune cinéaste québecois a vu son oeuvre créer la polémique avant d'être retoquée par le Conseil supérieur de l'audiovisuel. Face au reproche qu'on lui fit de montrer la violence pour la dénoncer, le réalisateur a répondu dans une tribune publiée par Le HuffPost.:
"On ne dénonce pas la violence en montrant de la violence" ajoutez-vous (Xavier Dolan s'adresse à la membre du CSA, François Laborde, ndlr.). Alors comment la dénonce-t-on? Comment la dénonce-t-on sinon par la démonstration par l'absurde? Qui peut ici se targuer d'avoir pu sensibiliser les générations précédentes à l'intolérance, l'agressivité et l'ostracisme?
Ce qu'on voit dans ce clip? La violence à l'école symbolisée par un adolescent crucifié puis abattu par ses petits camarades. Dolan eût beau dénoncer un "débat chimérique", dire qu'il a voulu "envoyer un message à la jeunesse", rien n'y a fait. Au tour du chanteur d'Indochine de prendre la défense de son réalisateur. Dans les colonnes du journal belge Le Soir, il déclara: "Nous ne cherchons ni la censure ni le scandale, ne visant que les problèmes d’éducation. Quand il est possible qu’une personne puisse acheter des armes sur Internet et qu’ensuite il l’utilise contre des innocents, il est urgent qu’on entreprenne là dessus une sérieuse réflexion politique."
Moyen n°3 - Trop vite tu réagiras
Lundi 19 mars 2012, la France va vivre un drame mais elle ne le sait pas encore. Alors que l'on ignore encore tout de Mohamed Merah, de son passé, de ses revendications, de son implication dans l'assassinat de plusieurs militaires Français, le terroriste tue de sang froid trois enfants et un adulte devant l'école juive Ozar Hatorah de Toulouse. Le bruit court très vite qu'une tuerie à eu lieu, les premières réactions tombent, dont celle de Laure Manaudou.
"Supprimez ces jeux vidéos à la c... Et ça ira déjà mieux!" s'exclame-t-elle dans un tweet qui veut relancer la polémique sur les jeux vidéo comme facteur de violence. Tollé. La twittosphère indignée l'accable, les autres rigolent. Laure Manadou décide de tirer sa révérence en supprimant son compte Twitter. "Cette affaire m’a vachement atteinte," déclarera-t-elle plus tard. "Pour moi, jusqu’ici, tout le monde était beau, tout le monde était gentil, mais apparemment non."
Moyen n°4 - Dans la démesure tu compareras
Comparaison n'est pas raison dit le proverbe, ce qui prouve bien que la Manif pour tous ne tenait pas la tradition en si haute estime. La preuve avec Xavier Bongilbault, la caution gay du mouvement d'opposition à la loi Taubira, qui se laissa aller à quelques analogies douteuses. Recherche sur l'embryon comparée à l'explosion de la première bombe atomique ou encore à la rafle du Vel d'hiv, l'affaire rappelle les quelques dérapages de la Manif pour tous, à commencer par un très beau point godwin lorsque le même Bongibault compara François Hollande à... Hitler. Une broutille.
"La Manif pour tous" : des porte-paroles... par LeHuffPost
Moyen n°5 - La Russie tu évoqueras
Polémiquer en invoquant la Russie est souvent une erreur. Parce qu'il s'agit d'un pays au passé troublé dirigé par un homme peu suspect de sympathie envers la démocratie, il convient au polémiste de rayer la Russie des nations candidates à son propre exil. Certes, Gérard Depardieu fut traité de "minable" par le Premier ministre Jean-Marc Ayrault avant de faire allégeance à Vladimir Poutine, ce qui n'est pas rien, mais il demeure compliqué de vanter les mérites d'un pays aussi respectueux des homosexuels que des journalistes.
Mais Depardieu est un provocateur. C'est un homme entier, et donc plein de failles. Trublion, provocateur, on l'avait déjà vu se poiler avec l'homme de main de Poutine en Tchétchénie Ramzan Kadyrov, ce qui décrédibilisait déjà toute sa démarche. Rien ne laissait pourtant présager la boulette d'une autre russophile, Brigitte Bardot, laquelle menaça de s'exiler à son tour en ex-URSS.
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La faute à Baby et Nepal, deux éléphants malades, soupçonnés d'être porteurs de la souche humaine du bacille de la tuberculose. Puisque personne, de Nicolas Sarkozy à François Hollande, ne daignait plus statuer sur le sort des deux pachydermes, Brigitte Bardot s'en remettrait à Poutine. "A chaque fois que je lui demande quelque chose, en principe, il me l'accorde", expliquait-elle alors. Depuis, Baby et Nepal ont été sauvés, ce qui n'est pas nécessairement le cas de Brigitte Bardot.
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