Cette semaine on colle à l’actualité des femmes. Les Tunisiennes ont lâché les hauts, ont arboré leur fierté, et utilisé leur poitrine comme arme contre le machisme. Courageux, dangereux, honteux, admirable. Cette symphonie d’adjectifs a rythmé les réseaux sociaux ces derniers jours. Pourquoi ? Une jeune tunisienne a posé nue pour défendre les droits des femmes pour faire passer ce message : «Mon corps m’appartient et il n’est l’honneur de personne». Défendre son corps en le montrant, en Algérie serait-ce possible ?
Non à cause des mœurs. Oui pour notre passé féministe. Non pour à cause des lois et de la religion. Oui pour les faire taire ces « privateurs » de liberté. Les arguments pour et contre, un mouvement Femen Algérie sont nombreux. Cette nouvelle forme de féminisme choque, perturbe et déstabilise mais a le mérite de faire parler d’elle, ça ne fait pas de doute. Qui l’eut cru qu’un groupe de femmes ukrainiennes allaient révolutionner le militantisme au féminin … en se dénudant. La vague Femen a voyagé au-delà de l’Ukraine, l’Europe a été emportée par cette vague et demain ce sera le Maghreb ? Si l’Egyptienne, Aliaa Magda Elmahdy et les Tunisiennes Amina et Meriam, peuvent le faire dans des pays où la liberté de la femme est perturbée par les récents évènements politiques. Pourquoi pas les Algériennes ?
Le corps des Algériennes leur appartient-il assez pour l’exposer, s’en servir d’arme ou de moyen d’expression ? Qu’en disent les Algériens ? Analysons les commentaires postés sur Facebook au sujet des Tunisiennes qui ont rejoint le mouvement Femen :
« Beh dommage qu’il n’y a pas ça en Algérie » estime l’un, alors que l’autre est critique : « Elle fait ça pour le buzz. » Puis nous avons le traditionnel macho, « J’ai cliqué pour les Nibards, aimes si tu as fait pareil ». Bien, bien, bien… Un autre mâle qui sauve ses congénères en poussant l’analyse plus loin. Il estime que « ce n’est rien d’autre qu’une forme de combat, de lutte et de provoc et si ces femmes en sont arrivées là c’est que tous les autres canaux de communication ont été épuisés. Certains Algériens, peut être la majorité, sont choques par toute les formes de lutte pour la liberté et des qu’un groupe ou un individu la revendique c’est tout de suite la conspiration et le complot… »
Et les Algériennes ?
On commence avec la légendaire solidarité féminine : « Je la salue c’est une femme pleine de courage» ou encore « bravo, bravo, bravo ». Puis la critique version féminine « elles veulent seulement provoquer qui vous savez », « être libre c’est bien mais montrer ses seins au monde entier ce n’est pas de la liberté c’est de la provocation. » Enfin pour terminer avec des remarques méprisantes « pathétique! », « elle représente rien à mon sens sauf une honte pour la femme maghrébine ! » voire insultantes que nous ne citerons pas…
Finalement, il semblerait que les femmes soient plus dures avec nos militantes Femen que les hommes, qui on s’en doute ont parfois d’autres motivations.
Alors verdict ? Le féminisme algérien a ses limites, ses règles. La fin ne justifie pas les moyens. On peut crier, manifester, risquer la prison, s’immoler, mais surtout ne pas se dénuder. Des femmes nues, peu importe leur message, resteront des femmes nues. Encore là, on s’attarde sur des bouts de chair, des images, une tenue et une réputation pour juger de la valeur d’une femme. La volonté, le sacrifice, le courage et surtout le combat de ces femmes sont en revanche oubliés. Seule la femme dite « respectable » a le droit de parler, et de militer ? Après tout pourquoi écouter une femme qui se déshabille pour défendre les droits de ses semblables, quand on peut museler une femme qui se cache derrière un voile ?
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