Deux hommes accusés de s'être embrassés en public début juin sur un site historique de Rabat ont été condamnés vendredi à quatre mois de prison ferme par un tribunal du Maroc, où un débat sur la dépénalisation de l'homosexualité s'est ouvert ces dernières semaines.
Lahcen, 38 ans, et Mohsine, 25 ans, étaient poursuivis pour «outrage public à la pudeur» et «acte contre nature avec un individu du même sexe».
Les prévenus, absents au moment de l'énoncé du jugement, ont également écopé d'une amende de 500 dirhams chacun, d'après des représentants d'associations ayant assisté aux trois audiences du procès.
Interrogé par l'AFP, un des avocats de la défense, Hassan Ettass, a annoncé son intention d'interjeter appel.
Il a également réclamé que la cour examine les accusations de mauvais traitements qu'auraient subis ses clients en garde à vue.
Arrêtés le 5 juin, Lahcen et Mohsine étaient accusés de s'être embrassés devant la Tour Hassan, un des principaux monuments de la capitale, au lendemain d'une action menée par deux militantes des Femen sur ce même site pour dénoncer la pénalisation de l'homosexualité au Maroc.
Ces deux Françaises, qui avaient posé seins nus et s'étaient embrassées devant les caméras, avaient été interpellées et expulsées le soir-même, les autorités marocaines dénonçant «une offense inacceptable pour l'ensemble de la société».
Lancée vendredi par l'association Aswat («Voix»), en collaboration avec l'ONG All Out, une pétition visant à réclamer la libération de Lahcen et Mohsine a recueilli plus de 70 000 signatures.
Au Maroc, l'homosexualité est passible d'une peine de trois ans de prison, selon l'article 489 du code pénal.
Des condamnations pour des «actes homosexuels» sont périodiquement rapportées par la presse marocaine. En mai, trois hommes ont ainsi écopé de trois années d'emprisonnement à Taourirt (nord-est).
Alors que l'ONG internationale Human Rights Watch (HRW) a appelé en mars le Maroc à dépénaliser l'homosexualité, le débat a gagné en intensité avec les dernières controverses, dans ce pays touristique tiraillé entre conservatisme et ouverture sur l'Occident.
Au lendemain de l'action des deux militantes Femen, quelque 1500 personnes ont manifesté devant l'ambassade de France, arborant des pancartes "Pas de ça chez nous".
De nombreux médias ont aussi dénoncé une provocation, en rappelant que l'islam est religion d'État au Maroc.
Mais le journal Maroc Hebdo, qui avait titré «Faut-il brûler les homos?», a été contraint de modifier cette Une et de présenter ses excuses à la suite du tollé provoqué sur les réseaux sociaux.
Un autre hebdomadaire, Tel Quel, a en revanche exprimé un avis remarqué en faveur de la dépénalisation de l'homosexualité. «Les homosexuels ne sont ni des déviants ni des malades», et «la loi ne peut pas s'immiscer dans les sentiments des gens», a-t-il souligné.
Après l'action des Femen, le groupe britannique Placebo a apporté lui aussi un soutien à la cause homosexuelle au Maroc, lors du Festival Mawazine à Rabat, un des principaux événements musicaux du pays.
Durant un concert, son bassiste et guitariste, Stefan Olsdal, a fait sensation en arborant une guitare arc-en-ciel puis en apparaissant, au moment du rappel, avec le chiffre «489» barré sur la poitrine, en référence à l'article du code pénal criminalisant l'homosexualité.
Selon l'ONG «Aswat», vingt homosexuels et transsexuels ont encore été arrêtés cette semaine dans la ville côtière d'Agadir et présentés à la justice pour «outrage public à la pudeur».
Via: tvanouvelles.ca
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