C’était un 1er octobre des plus banals. Puis des femmes qui s’étaient introduites à l’Assemblée nationale du Québec ont commencé à crier, topless. Mme Marois n’était pas très rassurée. Les élus sont restés bouche bée, tandis que des hommes de la sécurité sortaient ces femmes à moitié nues, criant comme des furies contre le crucifix à l’Assemblée. Ce sont les Femen.
Venant d’Europe de l’Est, ces représentantes du beau sexe et leur leader, l’Ukrainienne Inna Shevchenko, se sont implantées à Paris l’année dernière. Leur mouvement, lui, s’est exporté dans plusieurs pays du monde. Au Québec, elles étaient jusqu'à présent inconnues au bataillon. Ailleurs, les Femen, grandes revendicatrices de la cause féministe, ont concentré toute l’attention sur elles, et ce, au grand dam de leurs consœurs activistes. Montrer du « boob » (= nichon en anglais), ça attire les caméras.
Une nouvelle voie (et voix) du féminisme les Femen ? La prolongation naturelle de l’autodafé des soutiens gorges ? Permettez d’en doutez. Souvenez-vous d’Amina Sboui, membre du groupe en Tunisie. Après avoir passé plus de deux mois en prison pour avoir tagué le mot « Femen » sur le mur d’un cimetière, la jeune femme a quitté le mouvement les taxant d’ « islamophobie ». C’était peu de temps après que les « seins-ctivistes » aient brûlé un drapeau « salafiste » devant la Mosquée de Paris. Le message : toutes contre l’extrémisme « islamiste » qui persécute les femmes. Pardonnez les guillemets dans ces dernières phrases mais il y a définitivement un problème de définition en Occident lorsqu’il s’agit d’Islam et ce ni l’endroit, ni le moment de le régler. Bref, c’est sans compter le dérapage twittesque de leur charismatique chef de lutte. En juillet dernier, Inna la blonde s’interroge, «Qu’est-ce qui peut être plus stupide que le ramadan ? Qu’est-ce qui peut être plus moche que cette religion ?». Hum. L’intolérance peut-être ? Avec leur « religiophobie », ces doubles peu flatteurs de « la Liberté guidant le peuple » mettent en scène une femme capable d’attirer l’attention qu’à condition de dévoiler son corps (en règle général plutôt bien foutu). En quoi est-ce juste ? Égalitaire ? Ce n’est pas représenter les femmes. C’est ignorer toutes les autres femmes.
La femme qu’incarnent les Femen n’est pas une féministe. A l’heure où le féminisme a tendance à se remettre en question sur sa propre définition, notamment avec de jeunes générations qui n’adoptent pas forcément les mêmes idées que leurs aînées sur la question de lutte des sexes, les Femen font tâche. Tâches couronnées de fleurs, hyper sexuées et…hystériques, comme le montrent les images de leur action à la cathédrale Notre-Dame, à Paris. Bref, le stéréotype idéal de la femme à interner au XIX° siècle. Ne serait-ce pas jouer le jeu d’une société patriarcale ?
Brouillon et provoc’. La lutte pour l’égalité des sexes a encore bien du chemin à faire.
Billet écrit dans le cadre du cours de journalisme d'opinion à l'Université du Québec à Montréal (UQAM)
Via: blogs.mediapart.fr
Short link: Copy - http://whoel.se/~4MhEZ$4Ku