TUNISIE. "Femen ne regrette jamais son action"

Au lendemain de leur libération, les trois militantes européennes Femen condamnées à de la prison en Tunisie sont arrivées en France jeudi vers 11h30 à l'aéroport de Paris-Orly. Elles ont tenu dans l'après-midi une conférence de presse au cours de laquelle elles ont décrit leurs conditions de détention très dures pendant près d'un mois.

"Femen ne regrette jamais son action", ont lâché les deux Françaises Pauline Hillier et Marguerite Stern, et l'Allemande Josephine Markmann, coiffées d'une couronne de fleurs, lors d'une conférence de presse, en présence de la journaliste Caroline Fourest. "En Tunisie, si vous êtes née femme, c'est pas de chance (...). On ne regrette rien, si c'était à refaire, on le referait".

Les trois jeunes femmes ont décrit des conditions de détention difficiles : "Nous avons d'abord été enfermées dans une pièce sombre et insultées par les services de police", a raconté Pauline Hillier, 26 ans. "On nous a traînées dans le palais de Justice puis menottées dans des camions", a-t-elle poursuivi.

"Nous avons ensuite connu deux prisons. Dans la première, où nous n'avons heureusement passé qu'un jour, vous dormez dans des couvertures pleines d'urine et tâchées de sang", a-t-elle décrit. "La deuxième prison était aussi bien loin de respecter les droits de l'Homme", a continué la jeune femme, décrivant des "humiliations physiques, comme les fouilles au corps, où il faut se déshabiller entièrement et se mettre accroupi".

Visiblement émues, elles ont aussi raconté l'absence de draps, de vêtements, de douches, la cellule de 50m2 partagée avec 25 personnes, les cafards et "la tyrannie religieuse, partout". "Voilà ce que c'est d'être une prisonnière en Tunisie", a-t-elle conclu, parlant d'un "Etat liberticide".

Elles ont promis que tant qu'Amina Sbouï, leur camarade tunisienne emprisonnée depuis la mi-mai, ne serait pas sortie de prison, elles continueraient ce qu'elles appellent "le combat".

Des regrets pour le sursis 

Les militantes ont retrouvé la liberté dans la nuit du mercredi 26 au jeudi 27 juin, quelques heures après avoir été condamnées en appel à une peine avec sursis. Elles ont quitté la prison pour femmes de la Manouba peu avant minuit à bord d'un fourgon de police.

Après un bref passage au ministère de l'Intérieur pour d'ultimes formalités, elles ont été conduites directement à l'aéroport international de Tunis-Carthage où elles devaient passer la nuit avant de regagner l'Europe jeudi matin, selon leurs avocats et un responsable policier. 

Mercredi, les trois militantes féministes ont été condamnées à une peine de quatre mois et un jour avec sursis, a annoncé l'un de leurs défenseurs, Me Souhaib Bahri. 

Les trois Femen libérées à Tunis sont arrivées... par LeNouvelObservateur

Lors de l'audience d'appel mercredi, les jeunes femmes avaient pour la première fois exprimé des regrets pour leur action seins nus du 29 mai à Tunis en soutien à Amina Sbouï, une militante tunisienne de Femen emprisonnée depuis la mi-mai.

"Je regrette cet acte et je m'en excuse", a dit l'Allemande Josephine Markmann au juge Moez Ben Frej, qui lui faisait remarquer en français que "le droit musulman interdit de tels actes".

On ne pensait pas choquer les Tunisiens à ce point, il est hors de question pour nous de recommencer", a répondu à son tour l'une des deux Françaises, Pauline Hillier.

En première instance, les jeunes femmes avaient été condamnées à quatre mois et un jour de prison ferme, une peine dont la sévérité avait suscité les regrets de la France, l'Allemagne et l'Union européenne.

L'action seins nus avait été mal perçue en Tunisie, dirigée par le parti islamiste Ennahda, jusque dans les rangs de l'opposition laïque et des féministes tunisiennes.

"Nos inquiétudes se dirigent vers Amina"

Les ONG de défense des droits de l'Homme avaient pour leur part estimé que, même si l'action pouvait être jugée choquante, elle relevait de la liberté d'expression et ne devait pas être passible de prison.

Les avocats français des Femen, qui ont pu plaider mercredi à Tunis, se sont réjouis de ce verdict plus clément en appel"C'est un immense bonheur d'avoir plaidé en Tunisie pour la liberté des Femen et d'avoir été entendus et que le message qu'elles portent ait été entendu", ont dit à l'AFP Me Patrick Klugman et Ivan Terel.

Amina Sbouï attend en détention provisoire de savoir si elle sera inculpée pour avoir peint le mot "FEMEN" sur le muret d'un cimetière à Kairouan, à 150 km au sud de Tunis, pour protester contre un rassemblement de la mouvance salafiste. "On devrait en savoir plus dans les semaines à venir", a indiqué Me Bahri, qui la représente aussi.

Bande organisée

Si elle est inculpée, Amina risque deux ans de prison pour profanation de sépulture et six mois pour atteinte aux bonnes moeurs. Ces peines peuvent être considérablement alourdies si Amina est reconnue coupable d'avoir agi en bande organisée.

L'opposition laïque accuse régulièrement le gouvernement dirigé par le parti islamiste Ennahda de chercher à juguler la liberté d'expression et de viser à revenir sur les acquis des Tunisiennes. Les femmes en Tunisie bénéficient de la législation la plus libérale du monde arabe.

La libération des Femen intervient alors qu'une visite du président français François Hollande serait prévue pour début juillet. Dans se contexte, les avocats d'associations islamiques ont estimé mercredi que des pressions ont été exercées sur le tribunal pour que les militantes de Femen soient jugées plus rapidement en appel.

Me Seifeddine Makhouf a jugé que "des pressions exceptionnelles [ont été exercées] sur le ministère public pour fixer une audience le plus rapidement possible".

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Via: tempsreel.nouvelobs.com


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