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Débat : faut-il montrer ses seins pour se faire entendre ?
Retrouvez le live tweet de la table ronde sur le compte @ELLEactu POURInna Shevchenko, leader des Femen« Montrer ses seins n’est pas le seul moyen, mais c’est un bon moyen...
C’était le thème de la table ronde organisée par le magazine ELLE, autour des Femen et du féminisme, ce vendredi dans le cadre du festival de photojournalisme de Perpignan, Visa pour l’Image. Nous avons demandé à Inna Shevchenko, la leader des Femen, et à Lydia Guirous, la présidente de « Future, au féminin », de nous expliquer en quoi le corps pouvait (ou non) devenir une arme politique. Découvrez leurs arguments pour ou contre.
Hélène Guinhut et Emilie Poyard
Retrouvez le live tweet de la table ronde sur le compte @ELLEactu
POUR
Inna Shevchenko, leader des Femen
« Montrer ses seins n’est pas le seul moyen, mais c’est un bon moyen pour se faire entendre. Que les gens nous critiquent ou ne nous soutiennent pas, peu importe, ils ne peuvent pas nous ignorer. Nous sommes arrêtées, attaquées, kidnappées, cela montre à quel point les gouvernements sont effrayés par nos actions. C’est notre force. Nous vivons dans une société patriarcale qui essaye de cacher le corps des femmes, de nier leur sexualité. Nous redonnons du sens à ce corps en montrant que les seins ne sont pas là pour faire plaisir aux hommes ou être exposés dans un club de strip-tease. Nous sommes dans la rue, et nos seins parlent, ils envoient un message politique qui contribue à détruire le patriarcat. A travers nos actions, notre corps devient une arme politique. C’est une arme pacifiste car nous ne pouvons tuer personne, mais nous pouvons détruire l’oppression menée par des gens comme Berlusconi ou Poutine.
« Tout ce que nous faisons est contre le patriarcat »
Le monde a créé cette image de Barbie, une femme en plastique, immobile, qui doit être contrôlée pour pouvoir bouger. Les Femen sont des Barbie qui bougent par elles-mêmes, qui se battent. Quand les gens voient une femme en talons avec du maquillage, ils pensent qu’elle est stupide, que c’est un objet, une pute. Nous utilisons cette image pour montrer que même si je suis blonde et que je porte un micro-short, je lis des livres, je suis une battante et je véhicule un message politique. Pour intégrer les Femen, il n’y a pas de casting. Récemment, nous discutions de la possibilité de nous infiltrer dans un concours de top models pour faire une action. Nous avons vite réalisé que ce n’était pas possible, car aucune de nous n’a les mensurations exigées !
On nous reproche souvent d’avoir différents messages, mais tout ce que nous faisons est contre le patriarcat. Femen est religiophobe car religion et féminisme ne peuvent pas cohabiter. Regardez les livres sacrés : tous ont un chapitre qui dicte l’attitude que les femmes doivent adopter. Lorsque nous l’avons rencontrée, Amina nous a assuré qu’elle ne nous avait jamais accusées d’être islamophobes. C’était paradoxal de la voir spolier la campagne qu’elle avait elle-même commencée. Elle réalise qu’elle a fait une erreur et essaye de la réparer. »
CONTRE
Lydia Guirous, présidente de « Future, au féminin »
« Montrer ses seins, si l’objectif est d’être vue, photographiée et filmée, c’est un bon moyen... mais pas pour se faire entendre ! Pas pour porter un message crédible et politique. Les Femen utilisent leurs corps comme une arme marketing, autour d’une action mal définie. Si c’est pour défendre l’égalité femmes-hommes, c’est un non-sens, une régression : cela alimente le culte de la femme objet. Comme si les combats féministes n’avaient jamais existé… Le féminisme n’est pas la lutte des classes. Il faut le sortir de cette idéologie de la révolte, et en faire une politique publique tournée vers la réduction des inégalités.
On ne comprend pas leur message : elles sont à Notre-Dame, dans une mosquée, contre le nucléaire, puis devant les grilles du ministère de la Justice : on ne les suit plus ! L’action dans la cathédrale démontre à quel point elles ne comprennent pas ce qu’est la laïcité : il ne s’agit pas du rejet des religions, mais d’un principe de tolérance. On a l’impression de poupées Barbie à la plastique irréprochable, sans cerveau au-dessus des seins ! Il y a également chez les Femen une forme de discrimination qui décrédibilise leur action : y-a-t-il des femmes rondes, âgées ou de couleur lors de leurs happenings ?
« Les Femen, c’est le diktat de la pensée unique »
En février, j’avais qualifié le mouvement des Femen d’ethnocentré et de néocolonial. Les Femen, c’est le diktat de la pensée unique. Ça a de la gueule quand des femmes arabes se mettent seins nus : c’est un pied de nez aux islamistes qui ne les respectent pas. Mais dans le cas de l’affaire Amina, ces Ukrainiennes en Tunisie, c’était pour moi l’image du colonialisme. C’était « on va venir vous éduquer », une négation des règles du droit international, ainsi qu’une ingérence dans la diplomatie. Pour moi, les Femen ont porté préjudice à la cause des femmes dans les pays arabes et à toutes les féministes qui construisent la démocratie et se battent contre l’obscurantisme.
Il faut aussi arrêter de victimiser les femmes et dire que les hommes sont des bourreaux qu’il faut émasculer, comme sur leur site. « Future, au féminin » a pour but de promouvoir un féminisme pragmatique et républicain, avec les hommes. L’objectif : être efficace et pas doctrinaire. Dès 2012, la cellule SOS harcèlement sexuel que j’ai créée avec l’AP-HP, a permis à des centaines de femmes d’être prises en charge. »
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Via: elle.fr
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