Deux sons de cloches au procès des Femen

C’est un procès croisé. D’un côté, on évoque une cloche qui aurait perdu quelques millimètres de sa dorure. De l’autre, une femme qui aurait perdu une dent sous les coups d’un vigile. A la gauche du président de la 10e chambre correctionnelle de Paris, cinq belles jeunes femmes, tête haute, rouge à lèvres, visages conquérants. A sa droite, trois hommes plus si jeunes, regards bas, fuyant l’attention. Ce mercredi se tenait le premier procès français des Femen. Poursuivies pour des dégradations sur une des cloches de Notre-Dame, tandis que les membres du service d’ordre de la cathédrale comparaissaient, eux, pour violences. Le jugement sera rendu le 10 septembre. En attendant, les débats ont permis de mesurer le fossé d’incompréhension séparant la partie gauche et la partie droite de la salle.

Tous ont en tête les images. C’était le 12 février 2013. Neuf activistes féministes Femen pénètrent incognito dans la cathédrale Notre-Dame de Paris, se mêlant aux touristes. Au signal de leur chef, Inna Shevchenko, elles font tomber les manteaux. Se retrouvent seins nus en mini-shorts, le torse barré de slogans «Pope no more», «Crise de foi», «No Homophobe». Se précipitent vers les nouvelles cloches commandées pour les 850 ans de l’édifice, exposées au centre de la nef. Inna se faufile sous l’une pour en actionner le battant, les autres les font tinter en tapant dessus avec des bâtons recouverts de feutrine. Le but, diront-elles : fêter le renoncement du pape Benoît XVI à sa charge. Et l’examen à l’Assemblée du texte sur le mariage gay. Mais l’action «pacifique» dégénère. Les vigiles empoignent les jeunes femmes, qui crient et résistent. Un visiteur leur donne des coups de parapluie, une vieille dame les gifle.

Hématomes. Le président interroge les trois hommes prévenus sur les blessures dont les Femen ont fait état. L’une d’elle, qui explique que le gardien lui a «frappé la tête contre le sol», s’en est tirée avec deux dents cassées, de nombreux hématomes et une incapacité totale de travail (ITT) de quatre jours. Deux autres se sont vu prescrire une ITT de trois jours. Mais les surveillants nient la violence. «Je ne l’ai jamais poussée, je l’ai toujours tirée», dit l’un. «On était quatre, elles étaient neuf. En plus, dans la tenue où elles sont, y a pas de prise», dit l’autre.

Pourquoi ne pas attendre l’arrivée de la police, alors qu’eux-mêmes n’ont jamais reçu la moindre formation aux techniques d’intervention, insiste le président. «Il fallait arrêter ça, explique un des gardiens en agitant les bras, retrouvant un peu de sa panique de l’époque. Tous les touristes étaient autour, ils prenaient des photos. Il y avait aussi des enfants, des groupes scolaires venus voir les cloches.» L’un s’est emparé d’un drap «pour les habiller», un autre a éteint les lumières. C’est à ce moment-là, disent-elles, dans la pénombre, que sont partis «les coups méchants».

«Eraflures». A la demande du recteur archiprêtre de Notre-Dame, un «expert campanaire» (spécialiste des cloches) a recherché d’éventuels dégâts. Sur la cloche Marcel (chacune porte le prénom d’un saint), il a observé «des marques d’impact, ainsi que des éraflures» sur la «fine feuille d’or» du revêtement. L’ensemble de la commande de ces nouvelles cloches avait coûté 2 millions d’euros, financés par les dons de fidèles.

«Qui sont-elles pour faire sonner les cloches de Notre-Dame ?» s’est enflammée la procureure, oubliant un peu le principe de séparation de l’Eglise et de l’Etat. Pour les éraflures sur la couche d’or, elle a requis contre chaque Femen une amende de 1 500 euros. Pour les violences, elle a demandé contre les vigiles des amendes de 250 à 500 euros avec sursis.

Via: liberation.fr


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