Dans L’Ukraine n’est pas un bordel, l’Australienne Kitty Green, qui a vécu plus d’un an avec deux Ukrainiennes Femen, dépeint ce féminisme coup-de-poing sans en épargner les contradictions. La porte-parole de Femen Québec, Xenia Chernyshova, avoue que le mouvement est en quête de renouveau.
Dans le documentaire, on découvre Vicktor Sviatski, stratège derrière les premières Femen, qui se dit «patriarche» à leur égard. Quel rôle jouait-il exactement?
Viktor, c’était le penseur. Parce qu’il était plus âgé et plus cultivé. Sinon, leur féminisme est basé sur un seul livre, La femme et le socialisme, d’Auguste Bebel, qui est très intéressant, très juste, mais évidemment ce n’étaient pas des femmes capables d’une pensée très approfondie. À 19 ans, comment peux-tu être une femme comme Simone de Beauvoir si tu vis dans une société où il est honteux d’être intellectuelle?
Il (Viktor) est cru, il est affreux, il est odieux. Il leur parle comme nos pères nous ont parlé, comme nos maris nous ont parlé. Il est le produit de la société ukrainienne et il l’admet.
Le documentaire se clôt sur Inna Shevchenko, qui planifie aller en France et lancer une nouvelle branche de Femen. Le mouvement a aujourd’hui plusieurs groupuscules partout dans le monde, comme le vôtre. Comment s’assurer qu’il y ait une cohérence dans les revendications?
Femen n’est pas éclaté, c’est juste qu’il existe aujourd’hui ce qu’on appelle Femen International, qui est constitué de toutes ces Ukrainiennes activistes exilées, et ce Femen composé d’électrons libres, dont Femen France, mené par Inna, le plus gros et le plus médiatisé.
Il y a beaucoup de critiques à l’égard de Femen France – et ce n’est pas seulement la faute d’Inna. On lui reproche d’être une organisation confuse qui n’a pas de ligne directrice et qui a du mal à communiquer avec les autres groupes. C’est un gros défi, on s’entend, de mener un combat féministe à l’international. Femen fait aujourd’hui face à une crise énorme et prendra une autre direction grâce aux femmes qui vont y adhérer.
Renouveau «Le mouvement, il va changer et il le fait déjà.» – Xenia Chernyshova, de Femen Québec
Les Femen manifestaient en Ukraine contre Ianoukovitch bien avant le soulèvement de la place Maïdan qui a forcé ce dernier à quitter le pouvoir. Qu’espérez-vous pour la suite?
La révolution ukrainienne, qu’on le veuille ou non, les Femen l’ont inspirée en étant hypermédiatisées [...] Il n’y a personne en ce moment en Ukraine qui a accès au pouvoir et qui pourra changer quoi que ce soit. Il y a cette «génération créative» de jeunes éduqués qui ont voyagé, mais n’ont pas encore accès aux postes de pouvoir, occupés par des gens nostalgiques du communisme ou du capitalisme sauvage des années 1990 du chacun pour soi. Donc, Femen, ç’a toujours été les partisans de personne. Elles sont une force indépendante.
Ukraine is Not a Brothel
à l’affiche dès vendredi au Cinéma du Parc
Via: journalmetro.com
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