Les Femen contre les féministes : le débat devient possible

Débattre des relations hommes-femmes. Dire ce qu'on veut qu'elles soient. Quitter la dénonciation morale. Quitter le point de vue unique. Quitter l'outrage aux voix divergentes. Quitter le victimisme triomphant. Dire du bien des hommes qui s'acquittent de comportements égalitaires. Quitter les discours fondé sur l'identitaire. Quitter : les femmes sont victimes des hommes, les femmes sont victimes des attentes qui pèsent sur elles. Les hommes ne sont jamais victimes.

Retrouver une parole collective, populaire, que toutes et tous puissent pratiquer, dans laquelle toutes et tous puissent s'exprimer. Reprendre le chemin d'une recherche, d'un progrès. Prendre un chemin tout simplement et progresser ensemble. Ensemble. Sans que personne ne déclare l'autre incapable a priori.

Les Femen se présentent contre les « féministes qui discutent entre elles ». Les Femen veulent et pratiquent un féminisme de combat de rue.

Celles qui s’autoproclament « féministes » et voulaient exercer un monopole de la parole de l’égalité des hommes et des femmes entrent maintenant dans cette dimension politique des luttes internes. Si je mets des guillemets à « féminisme » c’est que le « féminisme » qui est le seul à avoir droit à l’expression publique dans les mass-médias est une condamnation identitaire des hommes et non un chemin vers l’égalité. Et que le chemin vers l’égalité ne peut aller jusqu’à son but que s’il est parcouru par les femmes et les hommes qui se mettent déjà dans l’égalité qu’ils veulent instaurer dans la société.

Les « féministes » commencent à se disputer pour savoir qui a le vrai dans leur idée féministe. Cette entrée non-voulue dans le débat « interne » va permettre de débattre dans la société d’égalité des hommes et des femmes, va permettre de sortir des crédos assénés sans cesse, que seules les femmes sont autorisées à pratiquer. Il devient envisageable de quitter cette répétition harcelante envers les hommes (droit de vote en 1945, plafond de verre, tous violeurs, même ceux qui ne sont pas passés à l’acte… crainte et mépris pour les valeurs féminines…). Il devient envisageable que tous entrent et participent à ce débat qui s’ouvre. Envisageable mais certainement pas automatique, ni même certain.

Ces débats entre « féministes » sont ce qu’on appelle en Analyse institutionnelle un analyseur : un moment où le fonctionnement ordinaire est supplanté par une discussion sur ce fonctionnement, ce qu’il est réellement, sa légitimité... C’est-à-dire que les questions « qu’est-ce que le féminisme ? » « que veut-il ? » se substitue au fonctionnement ordinaire dudit féminisme.

Marcela Iacub, Virginie Despentes et quelques autres nous ont joué leur Fillon-Copé en public.

Un jugement est tombé dans le Monde Diplomatique sous la plume de Mona Chollet : les Femen ne sont pas féministes ! Les Femen pratiquent un exercice dialectique qui consiste à se servir d’un élément fondamental contre lequel elles luttent pour propulser leur lutte.

D’une manière générale, le militantisme ne va guère avec la dialectique ; l’activisme est manichéen : il sépare, dans le discours, le bien et le mal par une cloison étanche et infranchissable. Il se met du côté du bien. Cette séparation est intenable et si le mouvement gagne, on le retrouve vite dans les pratiques qu’il condamnait. Perpétuelle déception.

De ce point de vue-là, les Femen révolutionnent la révolution. Cependant, c’est un exercice intellectuel extrêmement difficile et ces jeunes personnes vingtenaires ont bien du mal à s’y tenir et à développer toutes les conséquences de leurs difficiles prémisses philosophiques.

Un des chevaux de bataille des « féministes » consiste à dire que les femmes seraient réduites à leur corps. C’est réduire le mot fort. Mona Cholet porte cet argument. Le corps des femmes suscite beaucoup plus d’intérêt que le corps de l’homme. Même la médecine, d’essence scientifique, a une spécialité réservée aux femmes, la gynécologie. Ce surcroît d’intérêt n’est pas le résultat de l’action des hommes, (ni au sens des mâles, ni au sens des humains). Cet intérêt porté à la beauté des femmes se voit dans l’art, la peinture, la sculpture... Cet intérêt porté au corps des femmes n’est pas une infériorité en soi, ni une supériorité. Ni une indignité. Quand Mona Cholet dit que les femmes sont réduites à leur corps, elle invente le discours qu’elle prétend combattre et elle le prête aux hommes, conçus comme un groupe homogène, uni, solidaire et unanime. Quand Mona Cholet continue par « la négation de leurs compétences intellectuelles »…etc., le balancement, joli corps équivaut à faible intelligence, est assez pauvre et ne décrit pas ce qui se passe vraiment. Elle bâtit la femme et l’homme en ennemis incompatibles et les Femen (qui dans cette vision des choses se situent du côté de la beauté du corps de la femme, donc du côté de sa faible intelligence) ne sont pas féministes. L’affaire est pliée. En utilisant leurs corps pour avoir accès aux mass médias, elles s’inclinent devant la domination masculine.

On pourrait mettre les Femen dans la provocation qui a toujours plus ou moins marqué le mouvement féministe depuis les suffragettes… mais, elles n’ont rien à dire, ce qui va bien sûr avec la domination masculine qu’elles acceptent de fait(s).

Si vous voulez savoir ce qu’est le féminisme, demandez à Mona Cholet : c’est une structure de type parti unique, façon communisme, succès limité, insuccès profond et définitif : une bonne parole et des excommunié(e)s, des moins-que-rien (au Goulag).

Il faut débattre, il nous faut un féminisme partagé, reconnaître de la valeur positive aux hommes et partager également le mouvement vers l’égalité.

A On n’est pas couché, Inna Shevchenko co-fondatrice du mouvement Femen se contredit fréquemment. Elle est bien loin de la résolution dialectique des contradictions que les Femen mettent en œuvre. Elle reconnait que les Femen se déshabillent parce qu’ainsi, on va les voir puisqu’on va regarder leurs seins donc elles se dénudent pour que l’on regarde ce qu’elles écrivent sur leurs poitrines. Un homme qui est sur le plateau pour autre chose commence par dire qu’il a regardé les seins et jamais lu ce qui était écrit dessus. Inna Shevchenko dit qu’elle fait le contraire de ce que l’ordre établi commande aux femmes et plus tard, dit que personne ne lui dictera ce qu’elle a à faire ! Elle parle de soldates et l’on perçoit bien qu’elle une générale qui fait faire la guerre aux autres et qui ne prend pas les risques les plus graves. Aymeric Caron reprend une citation d’elle où elle déclare qu’elle fait la guerre aux hommes : elle ne répond pas qu’elle n’a jamais dit ça, elle répond qu’elle est avec les hommes et qu’il y a des hommes féministes.

Ces débats internes à ce « féminisme » de combat peuvent et doivent permettre l’expression de nombreux hommes féministes.



Via: agoravox.fr


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