À la une "Jacky au royaume des filles" : plus fort que les Femen !

Et si Cendrillon était un homme ? C'est l'argument de "Jacky au royaume des filles", le nouveau film de Riad Sattouf, auteur de BD et réalisateur ("les Beaux Gosses"). "Dans mon film, j'ai transféré aux femmes le pouvoir des hommes, pour montrer dans quel monde foldingo nous vivons", dit Sattouf, assis dans son atelier parisien, sur un tabouret, en grattant sa Travis Bean, une de ses huit guitares électriques ("Mes Ferrari").

A l'origine de cette fable, moitié farce, moitié cauchemar, où Cendrillon en a, où les hommes sont voilés, convoités, tripotés et sans cesse infériorisés par des femmes bestiales qui pensent avec leur clitoris, il y a un meurtre. Un meurtre non cinématographique, hélas, mais tragiquement réel. "J'avais une cousine très intelligente, raconte Sattouf qui a grandi à Ter Maaleh, un village sunnite en Syrie, le pays de son père. A 16 ans, elle est tombée enceinte, hors mariage. C'était sous le règne de Hafez al- Assad. En Syrie, cette situation est non seulement inacceptable mais inimaginable. Son père, mon oncle, l'a étouffée avec un coussin puis il l'a enterrée dans un champ, avec l'aide de mes cousins. Ensuite, il a été dénoncé par sa femme devenue à moitié folle. Il a fait trois mois de prison. A son retour, il est devenu une figure importante du village parce qu'il avait fait respecter son honneur. Je vous parle d'un monde où le père a le droit de vie et de mort sur ses enfants." Il ajoute prudemment : "Ce genre d'histoire n'est pas propre au monde musulman. En Syrie, il y a aussi des chrétiens et des Druzes. Et, en Occident, l'homme demeure la figure dominatrice, comme c'était le cas dans la famille de ma mère, une Bretonne. En Bretagne, au collège, on me traitait de pédé parce que j'ai une voix efféminée."

Dans "Jacky", critique du patriarcat et de la virilité, l'auteur de "Pascal Brutal" attaque le monothéisme du Prince charmant mais aussi "la glorification de la famille". Le regard aiguisé par sa double culture, il déconstruit avec l'âpre allégresse d'une Femen à testicules la Cendrillon de Charles Perrault et des frères Grimm. En fait de déconstruction, faut-il rappeler que Jackie est le véritable prénom de Jacques Derrida, l'auteur de "Feu la cendre" ? Dans la dictature matriarcale de Bubunne, c'est la Générale (Anémone) qui commande, tandis que sa fille, la Colonelle (Charlotte Gainsbourg), mande les plus jolis gars du pays pour se choisir un "grand couillon", c'est-à-dire un mari royal. Au royaume de Big Mother, la novlangue veut que les mots nobles soient féminisés ("voilerie") et les mots vils masculinisés ("culottin"). Noémie Lvivsky, sanglée dans son bel uniforme, ressemble à Zlatan Ibrahimovic. Michel Hazanavicius, infatigable michetonneuse, se donne à chacune en attendant de fomenter une révolution.

Images de la soumission absolue, les hommes portent une laisse autour du cou. Notre corps ne nous appartient plus. On voit même la fille de l'épicière harceler le beau Jacky (Vincent Lacoste) et le poursuivre, en Mobylette libidineuse, comme Riquet pourchasse Rosetta chez les frères Dardenne. Les femmes sont des cochonnes. Euh, pardon, les hommes sont des porcs. Cet apologue philosophique le démontre par l'absurde. Par la violence mate de ses bastonnades, souvenir autobiographique des châtiments corporels des écoles syriennes ("Tapez "Tortures in Syrian schools" sur YouTube, vous verrez"), par son inquiétante étrangeté, "Jacky" excède la simple pochade à la "Groland". Le décor du film, glaçant, ajoute au malaise de ce conte voltairien tendance Jean Yanne. "Nous avons tourné en Géorgie dans un village de déplacés de la guerre entre la Russie et l'Ossétie. Le palais de la Générale, c'est le palais de Gori, la ville natale de Staline. J'ai essayé de retrouver la lumière de la fête d' "Eyes Wide Shut" dans la séquence du bal, où tous les prétendants sont réunis devant la Colonelle. Ils me font penser à des spermatozoïdes." Chose étrange, ces pieuses voileries blanches rappellent la profane panoplie des gamètes de Woody Allen dans "Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur le sexe…". C'est là où le film cesse d'être une parabole qui intervertit les rôles sexuels pour devenir une glose sur l'identité masculine : "La part masculine, c'est ça : cent millions de trucs essaient pour un seul qui réussit. C'est à la fois hyper-émouvant et désespérant. A l'école, on nous montrait ces films de biologie. On voyait le spermato dans un coin, très loin de l'ovule, mais mégamotivé pour y aller. Il doit tenter le tout pour le tout, c'est inscrit en lui, il gigote comme un malade, il se lance, même si c'est vain, même s'il n'a statistiquement aucune chance de réussir." Jacky de tous les pays, méga-motivez-vous !

Via: cinema.nouvelobs.com


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