Atlantico : L'idée reçue sur le fait que le Coran réserve une place dégradante de la femme dans la société musulmane a la vie dure. Qu’en est-il exactement ?
Zeina el Tibi : Il est clair qu’il existe un grand décalage entre, d’une part, les clichés et les idées reçues et, d’autre part, la véritable doctrine de l’islam, telle qu’elle découle du Coran et de l’enseignement du Prophète Mohammed. Il suffit de lire le Coran pour être convaincu que le livre saint de l'islam a représenté un progrès pour la condition féminine. Non seulement, l’égalité hommes-femme est affirmée sur le plan spirituel, le Coran parlant constamment des croyants et des croyantes, mais encore la complémentarité entre l’homme et la femme qui sont un couple, "un vêtement l’un pour l’autre", et aussi l’égalité des droits entre l’homme et la femme sur le plan social. Outre les principes du Coran, tout l’enseignement du Prophète prône le respect de la femme. C’est donc à ses sources fondamentales qu’il importe de remonter.
Les traitements parfois extrêmes réservés aux musulmanes n’auraient donc pas une origine religieuse ?
Il faut faire la distinction qui s’impose entre la religion musulmane et les coutumes et autres pratiques ou habitudes qui sont très éloignées des prescriptions islamiques. S’il est incontestable que la condition de la femme dans certains pays musulmans - et plus particulièrement dans certaines couches de population - est déplorable, ce serait une erreur d’imputer la responsabilité de ce genre de situation à l’islam. Par exemple, des déguisements comme la burqa et le tchador sont des coutumes locales (afghane, perse) qui n’ont rien à voir avec la religion. L’excision est une pratique africaine, régulièrement condamnée par l’islam et d’ailleurs inconnue dans les pays musulmans en dehors de l’Afrique noire (où elle concerne d’ailleurs aussi bien les chrétiennes que les musulmanes). La polygamie n’a pas été initiée par l’islam qui, au contraire incite à y mettre un terme en posant des conditions si strictes qu’elle est irréalisable. Le voile lui-même n’a rien d’islamique : il n’y a aucune prescription en ce sens. En réalité, ce qui fait du mal à l’islam, ce sont les ignorants et les charlatans qui racontent n’importe quoi et trahissent le vrai message progressiste et humaniste de l’islam. C’est ainsi qu’a pu prospérer un conservatisme outrancier, enfermé dans la stagnation et la routine et encouragé par l’ignorance, la répétition d’habitudes folkloriques et de coutumes surannées.
Ne peut-on pas dire par ailleurs que les femmes ont joué un rôle dans la construction de l'islam ?
Bien sûr. C’est un fait historique qu'il y a un rôle éminent joué par de nombreuses femmes dès les origines de l’islam puis dans l’épanouissement de la civilisation arabo-musulmane. Il est notable que le premier musulman, c'est-à-dire la première personne à croire en la Révélation transmise par le prophète Mohammed était une femme : Khadija, l’épouse du Prophète. Ensuite, beaucoup d’autres femmes ont tenu une place importante durant la montée en puissance de l’islam. Au fil des siècles, des femmes musulmanes se sont illustrées par leur foi, leurs connaissances, leurs actions au service du développement de la société islamique.
Via: atlantico.fr
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