Des centaines de cartouches vides jonchent les rues de Cizre. Sur les premières photos qui ont circulé dans les médias après la levée du couvre-feu samedi matin vers 7 heures, on aperçoit des immeubles dévastés. Le couvre-feu qui avait été imposé à 20 heures le 4 septembre a été justifié par les autorités comme une mesure de sécurité face aux menaces montantes du PKK.
Dès la levée du couvre-feu, les habitants sont sortis faire le plein de nourriture et vérifier l'état de leurs commerces. Des mesures strictes étaient toujours en place dans des zones clés de la ville ce samedi. Des véhicules blindés patrouillaient les rues de Cizre, situées au nord de la frontière syrienne et près de la frontière avec l'Irak. Les forces de sécurité ont installé des points de contrôle en périphérie de la ville.
Selon les médias, le bureau du gouverneur de Sirnak a déclaré un nouveau couvre-feu à Cizre qui aurait commencé à 19 h dimanche 13 septembre mais qui a de nouveau été levé ce lundi.
«Même en temps de guerre, on permet les enterrements»
Le parti démocratique des peuples (HDP) pro-kurde a rapporté que 21 civils avaient été tués dans les affrontements qui ont eu lieu à Cizre, ville qui compte 100 000 habitants. Samedi, le ministre par intérim des Affaires européennes, Ali Haydar Konca, a également déclaré que plus de 20 civils avaient été tués, avant d'ajouter que près de 50 avaient été blessés pendant le couvre-feu.
«Nous avons pu voir à quel point la ville de Cizre a été détruite lorsque nous avons su que plus de 20 civils avaient été tués, que près de 50 avaient été blessés et que de nombreux logements avaient été détruits. Même en temps de guerre, les enterrements sont assurés et les blessés sont autorisés à recevoir des soins à l'hôpital. Mais cela n'a pas été le cas à Cizre. Ce pays ne mérite pas d'être témoin d'images de corps d'enfants conservés dans un congélateur», a-t-il dit.
Après la levée du couvre-feu samedi, les locaux ont immédiatement transféré les morts et les blessés à l'hôpital. Des tentes ont été installées dans divers endroits de la ville afin de permettre aux personnes le souhaitant de présenter leurs condoléances pour ceux qui ont été tués.
«S'il avait été emmené à l'hôpital, il serait vivant»
Le corps de Cemile Cizir Çagirga, 10 ans, tuée dans les affrontements, a été conservé dans un congélateur par sa famille, incapable de l'emmener à la morgue à cause du couvre-feu et des autres restrictions policières imposées dans le quartier. La diffusion des photos de son corps a provoqué l'indignation du peuple, de l'opposition et de militants des droits de l'homme. La mère de Cemile Cizir Çagirga, Emine, s'est exprimé à l'agence de presse Cihan en expliquant que sa fille avait été tuée lorsque les forces de sécurité ont ouvert le feu sur leur maison le 7 septembre dernier.
Le Premier ministre turc, Ahmet Davutoglu, avait déclaré qu'aucun civil n'avait été tué à Cizre.
Autre victime des affrontements, Sahin Açik, 74 ans, qui recevait un traitement pour son hypertension. Il a été malade une nuit et est mort, sa famille n'ayant pas pu le transférer à l'hôpital. Mehmet Sait Nayci, 16 ans, fait également partie des victimes. Son père dit qu'il est mort lorsque la police a ouvert le feu sur lui dans la rue. «Mon fils a agonisé pendant six heures. S'il avait été emmené à l'hôpital en ambulance, il serait vivant à l'heure qu'il est», assure-t-il.
«C'était comme ces scènes qu'on voit en Irak et en Syrie»
Mehmet Erdogan, 75 ans, était sorti acheter du pain samedi matin mais a été tué sur le chemin, une heure avant la levée du couvre-feu. «Nous avons souffert de la faim et de la soif chez nous pendant huit jours. C'était comme ces scènes qu'on voit en Irak et en Syrie. Nous ne méritons pas cela», a déclaré Haci, habitant de Cizre et père de trois enfants, à l'agence Reuters.
Meral Danis Bestas, députée HDP qui s'est rendu à Cizre samedi, avait déclaré ce jour-là à Reuters que «les locaux ne [pouvaient] toujours pas organiser d'enterrement pour leurs proches, les corps sont à la morgue. La vie n'est pas revenue à la normale. La nourriture est rare et les services médicaux aussi».
Maisons criblées d'impact de balles et carcasses de voiture dans les rues
Les communications ont été restaurées samedi, alors que l'Etat avait suspendu les services de téléphonie mobile et d'internet avec le couvre-feu. Des files d'attente se sont formées devant les boulangeries de Cizre et les reportages de télévision montraient des façades de maisons criblées d'impacts de balle et des carcasses de véhicules parsemés dans les rues. Le couvre-feu a laissé les habitants dans des conditions terribles. Les échanges de tirs incessants et les explosions ont immobilisé la vie à Cizre. Selon les médias, il a été fait usage d'armes lourdes lors des affrontements.
Via: zamanfrance.fr
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