Salon de la femme musulmane: Inna des Femen répond aux …

Les années passent, les images se ressemblent. Dimanche 13 septembre, deux activistes Femen ont interrompu une conférence au Salon de la femme musulmane à Pontoise (Val d’Oise) en débarquant sur scène seins nus, la poitrine barrée d’un “Personne ne me soumet“, avant d’être éjectées manu militari par le service d’ordre de l’événement.

Mais l’action a été éclipsée par une polémique concernant les propos tenus au cours de cette conférence par les deux imams Medhi Kabir et Nader Abou Anas. Une dépêche AFP rapporte que, selon Inna Shevchenko, “les deux imams étaient en train de parler de la question de savoir s’il faut battre ou non sa femme”. Or, cette “version est erronée” assure le journaliste de Buzzfeed David Perrotin, “Medhi Kabir était en train de demander aux musulmans d’avoir un comportement exemplaire avec les femmes, “de suivre le modèle du prophète, qui ne tapait jamais sa femme et qui ne se faisait pas servir”. Voici la dernière phrase prononcée: “Nous voulons des musulmans et des musulmanes qui se comportent comme s’est comporté le prophète…”” Le journaliste s’appuie notamment sur un enregistrement d’une partie du discours, dans lequel on entend les deux imams encourager “le dialogue avec l’épouse” : 

“Il faut être bienfaisant avec la femme, et ne pas la considérer comme quelqu’un qui fait à manger, qui fait à boire, qui donne des rapports quand il en a envie, etc. Ceux qui pensent ça n’ont pas compris l’islam.”

Mais la citation d’Inna Shevchenko extraite de la dépêche AFP avait déjà fait le tour de la presse internationale, donnant l’impression que la conférence posait frontalement la question du recours à la violence domestique.

Contactée par nos soins, Inna Shevchenko nous explique:

“J’ai dit que les imams ont abordé cette question par le fait même d’expliquer que, comme Mahomet ne battait pas sa femme, les hommes ne doivent pas le faire. Pour nous, le fait même de rappeler qu’il ne faut pas battre sa femme est en soit un débat puisque cela n’est pas évident pour toute l’audience. Certains d’entre eux se sont d’ailleurs empressés de ne pas suivre ce conseil et de frapper nos deux activistes.”

Ce que l’on peut effectivement voir sur la vidéo ci-dessus. Pour l’activiste, ces imams n’ont fait que “policer leurs discours suite aux nombreuses critiques” :

“Ces imams, pourtant connus pour leurs propos sexistes et misogynes, se sont montrés très prudent dans leur façon de communiquer sur ce sujet, et à dessein, à cause de la polémique publique entourant le Salon. C’est pour cela qu’ils ont abordé cette question ainsi. Ils se sont affublés de masques d’hommes progressistes, qui sont tombés avec l’apparition des Femen sur la scène.”

Dans un communiqué publié sur leur page Facebook ce 14 septembre, les Femen assurent avoir été évacués du bâtiment par la police “sous les doux cris de “il faut les tuer ces salopes”, des “Allahu Akbar” ou encore des “sales putes.” Et concluent dès lors que “l’opération séduction mise en place par les organisateurs du Salon Musulman a donc complètement échouée après cette mise en lumière de la violence sous-jacente à l’idéologie de cette extrême droite religieuse. Le discours modéré du Salon ne peut pas cacher la violence de leurs actes envers les femmes.

Une lecture partagée par la journaliste du mensuel féministe Causette, qui a assisté à la conférence. Selon elle, la présence de journalistes et d’un micro de RTL ostensiblement dirigé vers les enceintes ont clairement dissuadé les deux imams de tenir les mêmes propos violents que dans leurs prêches habituels. Ils auraient d’ailleurs commencé leur conférence en répondant aux accusations dont ils font l’objet :

“Ne croyez pas les conférences coupées sur Internet. Malheureusement, on n’arrive pas à se faire entendre et comprendre des non-musulmans. Non, ce n’est pas un double discours […],c’est simplement que quand on s’adresse à un public qui est musulman, y a déjà des bases, des acquis, […] il y a certains points qu’on ne détaille pas.”

Un événement très controversé 

Le Salon de la femme musulmane avait déclenché la controverse bien avant l’action des “sextrémistes”. Outre le fait de proposer des ateliers shopping et cuisine (drôle de vision de la femme), et de ne compter que deux femmes (dont une conférencière et une cuisinière ) sur huit invités, l’événement accueillait des personnalités du monde musulman aux discours très radicaux. Comme Rachid Abou Houdeyfa, imam de la mosquée de Brest, qui semble justifier certains abus dans un prêche mis en ligne sur Youtube en 2012: “Si la femme sort sans son hijab, qu’elle ne s’étonne pas que les frères, les hommes, qu’ils soient musulmans ou non, abusent de cette femme-là, la néglige, ne lui donne aucune importance, ne la veulent pas pour sa religion, sa bonne moralité mais simplement pour son corps, son visage qui attire.

Parmi eux également les deux imams invités dimanche à parler de “la valorisation de la femme en Islam” : Nader Abou Anas, un prédicateur enseignant le Coran et l’arabe, qui justifiait tout bonnement le viol conjugal dans une vidéo datée de 2014 :

“La femme ne sort de chez elle que par la permission de son mari. Sa place est de rester dans vos demeures. Le soir, il a une envie, et elle ment. Elle dit : “non, je suis fatiguée, je suis-ci, je suis-cela.” L’homme, il craque. Qu’elle sache que les anges la maudissent toute la nuit dans le cas où elle se refuse à son mari sans raison valable.”

Et Mehdi Kabir, imam de la mosquée de Villetanneuse, qui assurait dans une vidéo datant de 2013 que la femme qui désobéirait à son mari “sera maudite par les anges d’Allah“, et s’en prenait au parfum dans une autre vidéo: “Combien de jeunes femmes de nos jours non mariées sortent de la maison de leurs parents maquillées et parfumées comme si elles étaient envoyées pour qu’elles soient demandées en mariage par un homme ? Et combien sortent de la maison de leur mari parfumées et séduisantes, comme si elles cherchaient un autre époux?”

Des discours qui ont fait bondir plus d’une féministe, et donné lieu à une pétition contre la tenue de l’événement – qui a récolté plus de mille signatures et attiré l’attention des Femen. Mais, comme le note Le Figaro, un précédent salon organisé par la même société en février dernier avait été annulé en raison d’une forte contestation sur les réseaux sociaux, dont plusieurs messages émanaient de membres du Front national.

Les Femen vont-elles trop loin? 

Régulièrement accusée de porter atteinte au respect des religions, voire au respect d’autrui, Inna Shevchenko rejette toute accusation d’islamophobie, terme “qui ne veut rien dire” selon elle:

“On dit que nous sommes islamophobes, voire racistes, alors que notre position est claire : nous critiquons les idées, pas les gens. Nous condamnons le message de cet événement, nous ne sommes pas en train de dire que tous les musulmans sont violents ! Les gens ont actuellement peur de parler car ils ont peur qu’on les traite d’islamophobes. Moi, je refuse d’être politiquement correcte à l’heure actuelle. Je trouve ça inutile. Je ne vais pas rester silencieuse devant de tels messages attaquant les femmes en tant qu’êtres humains, attaquant l’idée même d’égalité. Nous voulons prendre la parole, et nous le faisons, même si la religion est une question très sensible, et tout particulièrement dans son rapport aux femmes, et ce depuis des siècles. Mais c’est justement en raison de cette sensibilité que nous devons aborder ce problème, et tenter d’y répondre.”

Même si elle se dit “très fière” de l’action menée dimanche, la jeune femme avoue craindre de plus en plus pour sa sécurité:

“J’avais seulement 21 ans quand j’ai commencé à comprendre que je pouvais être tuée. C’était en Biélorussie. Puis il y a eu les événements ukrainiens qui m’ont poussé à fuir, et, récemment, l’épisode de Copenhague, où j’assistais à un événement paisible sur la liberté d’expression avant d’entendre une kalashnikov…”

A désormais 25 ans, Inna Shevchenko se dit “plus endurante” qu’auparavant. “Tous ces épisodes me confirment que ce que nous faisons est nécessaire” conclut-elle, “Si l’on s’arrête, on se suicide. Ce que je me demande maintenant c’est comment faire encore mieux, comment aller encore plus loin.” En réponse à leur dernière action, la page Facebook du groupe a été hackée, avant d’être rapidement rétablie.

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Via: lesinrocks.com


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