Qui sont réellement les Femen? La réalisatrice australienne Kitty Green tente de le découvrir dans L'Ukraine n'est pas un bordel, présenté mercredi à la Mostra de Venise. Elle y révèle notamment le rôle méconnu joué par un homme au sein du mouvement féministe.
En effet, c'est un quadragénaire, Victor Svyatski, qui a fondé le mouvement en guerre "contre le patriarcat et la mainmise des hommes sur les femmes" en 2008 à Kyiv. Non pas que la présence d'un homme au sein d'un mouvement féministe soit incohérent, mais le paradoxe réside dans sa personnalité et son rôle: dans le film, on ne le voit pas mais on l'entend donner des ordres au téléphone. A travers les conversations, les commentaires des jeunes femmes filmées au quotidien, Victor apparaît dans le documentaire comme un homme très égocentrique, à la recherche du pouvoir, mélange de gourou et de pater familias de substitution.
Dissensions
Inna Chevtchenko, l'une des fortes têtes du mouvement, a expliqué que Victor Svyatski a depuis quitté les Femen. Selon elle, le mouvement s'est largement divisé depuis sa création, notamment à cause de Victor: nombre de Femen avaient choisi de se soustraire à "l'emprise" de cet homme. Le film s'achève d'ailleurs sur ces dissensions.
Inna Chevtchenko ne craint pas le paradoxe et rend hommage à l'homme qui lui a ouvert les yeux. "Victor nous a donné la possibilité de comprendre ce que fait le système patriarcal: les femmes sont esclaves du sexe, la violence est exercée contre elles dans les foyers, il nous a fait comprendre aussi combien les hommes peuvent être des salauds". Elle ajoute: "C'est un paradoxe mais c'est la réalité. Sans ce monde patriarcal dans lequel nous avons grandi et que nous voulons fuir, nous n'aurions peut-être pas eu le courage de construire ce mouvement, sans cette violence que nous avons connue nous-mêmes".
Déception
Kitty Green, 28 ans, a d'abord été perturbée par la présence de ce fameux Victor. "Après quelques mois j'ai découvert la vérité sur le mouvement et j'ai été un peu déçue. Pendant un temps j'ai même cru qu'il ne s'agissait pas de réelles féministes. Mais j'ai décidé de continuer quand même à tourner pour montrer la vraie face de l'organisation".
La réalisatrice se réjouit toutefois que "les filles" aient pu avancer à l'étranger et lutter "l'homophobie, la collusion entre l'Etat et l'Eglise, les régimes autoritaires et les fraudes aux élections". Des féministes de tous les combats.
Avec
Via: lexpress.fr
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